IDAVOLL

Les Orcades - Un réseau de voies navigables de l'Âge Viking redécouvert grâce à la toponymie

Un ancien réseau de voies navigables datant de l'Âge Viking a été mis au jour par une équipe de chercheurs et d'archéologues. Tombé dans l'oubli, il permettait autrefois de relier une grande partie des fermes de l'archipel des Orcades au centre du pouvoir basé à Birsay.

La curiosité des chercheurs a été éveillée par un ensemble de toponymes en vieux norrois liés à la navigation, alors que les lieux qu'ils servent à désigner se trouvent dans le centre de l'archipel, à plusieurs kilomètres de la mer et de l'océan.

L'étude, publiée le 4 Août 2020 dans la revue scientifique Journal of Wetland Archaeology, a été menée dans le cadre d'une collaboration entre les Universités des Highlands and Islands, de St Andrews et du Pays de Galles. "Les investigations interdisciplinaires de cette étude fournit un exemple de ce qui peut être réalisé lorsque des universitaires de différentes disciplines travaillent ensemble sur un thème de recherche commun", s'est félicitée Barbara Crawford, professeur de la faculté d'Histoire de l'Université de St Andrews et professeur honoraire à l'Institut des Études nordiques de l'University of Highlands and Islands.

 

Greenay, Knarston et Warth

Les Orcades - Un ancien réseau de voies navigables traversait de part en part l'Archipel des Orcades à l'Âge Viking - Photo: Université de St AndrewsLes noms donnés aux fermes et aux exploitations agricoles au cours de l'Âge Viking sont connus et étudiés depuis longtemps dans le nord de l'Écosse et dans les îles. Ici, les chercheurs se sont plus précisemment penchés sur l'étude des toponymes en lien avec la mer ou la navigation, bien que servant à désigner des endroits situés actuellement à l'intérieur des terres.

Par exemple, Greenay, qui signifie "eaux peu profondes", ou Knarston ('knarrar staðir' en vieux norrois, dérivé de 'knörr', soit le nom d'un navire de transport, et de 'staðir' pour une ferme) sont des toponymes qui désignaient à l'origine des lieux de mouillage pour les bateaux vikings. Warth, dérivé du vieux norrois 'varða' qui signifie "balise", est un nom attesté au Danemark et utilisé pour désigner une vagttårne ("tour de guet") dans des endroits en aval des voies navigables, comme dans le fjord de Roskilde.

En outre, des méthodes géophysiques de télédétection ont été utilisées pour cartographier une série de canaux, comblés de nos jours, qui s'étendaient du nord du Loch de Harray aux lochs de Sabiston et de Boardhouse.

Enfin, ces données ont été recoupées avec d'anciennes cartes du secteur et des analyses d'échantillons de sédiments prélevés dans le sol de différents sites-clés de la région.

 

Une zone humide remodelée à travers le temps

Il est difficile aujourd'hui de voir en surface quoi que ce soit des anciens cours d'eau, car l'activité agricole et les réseaux de drainage artificiels créés au cours des trois derniers siècles ont contribué à fortement modifier l'aspect originel de cette vaste zone humide.

Toutefois, grâce à l'analyse des données scientifiques, les chercheurs ont réussi à modéliser toute une série d'anciens cours d'eau ou de canaux et à les relier aux toponymes à connotation nautique. "Il est assez fascinant de voir comment l'analyse scientifique a pu être corroborée par l'étude toponymique. Je n'aurais pas cru que les deux groupes de données puissent se conserver avec près d'un millénaire d'évolution", a confié le Dr Richard Bates de la Faculté des Sciences de la Terre et de l'Environnement, à l'Université de St Andrews.

En définitive, la route fluviale empruntée à l'époque par les Vikings, allait du loch de Harray - le lac situé au milieu de Mainland, l'île principale de l'archipel des Orcades-  jusqu'à l'île de Brough of Birsay - située à 240 mètres au nord-ouest de Mainland et accessible à marée basse par une chaussée en partie naturelle - en passant par le loch de Banks, Twatt et le Loch de Boardhouse.

Cet itinéraire complet permettait donc de rejoindre le siège du pouvoir à Birsay, où se trouvent encore de nombreux vestiges archéologiques parmi lesquels ceux de la première cathédrale des Orcades, connue sous le nom de Christchurch et fondée au XIème siècle par le comte Thorfinn le Puissant. 

 

Une nouvelle carte des Orcades à l'Âge Viking

Le réseau des voies navigables peu profondes aurait formé, d'après les chercheurs, une route par laquelle les Vikings pouvaient à la fois se déplacer en bateau et transporter de lourdes cargaisons de marchandises, notamment des récoltes de grains. Les taxes et les loyers pouvaient de la sorte être collectés dans les fermes les plus au sud, autour de Harray, et être emportées sur l'eau jusqu'à Birsay.

Le même réseau offrait également un accès aux eaux de Scapa Flow et de l'Atlantique Nord. Les recherches universitaires parviennent ainsi, peu à peu, à redessiner la carte des Orcades au temps des Vikings. "Je suis ravie du résultat, car de multiples éléments issus des sources écrites et de l'environnement suggèraient l'existence de la voie navigable. Ces résultats seront utilisés dans notre étude continue sur la façon dont les Scandinaves ont utilisé et organisé le paysage des Orcades", a déclaré le Dr Alexandra Sanmark, de l'Institut d'études nordiques de l'Université des Highlands and Islands.

Ces dernières années déjà, un canal de l'époque viking a été découvert dans la péninsule de Rubh an Dunain, sur l'île de Skye. Il permettait d'accéder au port viking du Loch na h-Airde. [À lire sur Idavoll: Ecosse - Un port viking et son canal, sur l'île de Skye, reconnus monuments historiques​]

toponyme voie navigable Orcades archéologie viking

  • Aucune note. Soyez le premier à attribuer une note !

Ajouter un commentaire